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Cinéma érotique

Laura Antonelli in Malizia (1973) - Salvatore Samperi

Tarzoon, la honte de la jungle / Tarzoon, shame of the jungle (1975) - Boris Szulzinger, Picha

Petite histoire du cinéma érotique et pornographique

Du premier strip au dernier clic

Le film X est né en France, où les frères Lumière projettent les premières images animées en 1895 et où, dès 1896, un film intitulé Le Bain, qui a hélas disparu depuis, montre la première scène de strip-tease de l'histoire du cinéma. En 1907, Le Voyeur (le titre est éloquent), contient lui aussi une scène de strip-tease. Aux Etats-Unis, les premiers films X sont réalisés en 1908, année qui voit d'ailleurs la création des premières commissions de censure. A Grass Sandwich, premier " vrai " film porno, c'est-à-dire avec un scénario, est tourné en 1915.

Dans les années 1920-1930, le cinéma pornographique connaît un premier âge d'or, immédiatement suivi d'une crise. Alors que dans le cinéma classique, les techniques évoluent à grands pas, les films X restent synonymes d'amateurisme et de médiocrité. L'âge d'or du porno en Europe se situe entre 1930 et 1938, avec des œuvres qui ont effectivement une vague prétention " artistique ".

La Seconde Guerre mondiale coupe net l'élan du cinéma porno. Les années 1940 et 1950 voient la production d'une pléthore de films désolants dont les héros jouent aux docteurs, en particulier aux Etats-Unis. En Europe, la France est le chef de file du mouvement, les réalisateurs s'affranchissent progressivement d'une structure à épisodes, caractérisée par une succession de " bons plans ", pour bâtir de véritables intrigues teintées de sado-masochisme. Le Manoir de Châtiment (1948), puis Esprit de famille, ne sont que deux exemples parmi d'autres.


Les premiers films sur les camps de nudistes apparaissent vers la fin des années 1950, surtout en Suède. C'est la vogue des " Nudie-Cuties ", petits films mettant en scène des jeunes filles naïves, rétives au nudisme, qui abandonnent peu à peu leurs réticences ou dans lesquels des intrus, reporters ou parangons de la vertu, jouent un rôle important. Mais ici, la nudité n'a encore aucune connotation sexuelle explicite.

Les " Beaver-Movies " des années 1960, sortes de strip-teases filmés en Super-8, sont de la même veine. Entre 1965 et 1970, les films d'éducation sexuelle sont très en vogue en Allemagne, ainsi ceux de la collection " Helga " ou les œuvres d'Oswalt Kolle, dont Dein Mann, das unbekannte Wesen (Ton mari, cet inconnu). Les films X à proprement parler ne font leur apparition que plus tard, avec des films plus osés tournés en Scandinavie. Après 1969 et la loi de dépénalisation, les films danois inondent le monde. A la même époque, parallèlement aux "beaver-movies", les pornos lesbiens marchent très fort.


Le premier film érotique moderne date de 1970 : Mona : The Virgin Nymph (1970) de Bill Osco, tourné en 16-mm. Dans la même veine, on peut citer la série des Emmanuelle, qui annoncent un nouveau style dans les images sexuelles et influencent le divertissement, la mode et la publicité, mais aussi la pornographie elle-même. Ces films, esthétiques comme des pubs pour des produits cosmétiques, rendent pour la première fois le genre accessible aux femmes, d'autant plus que Emmanuelle ne comporte pas de scènes vraiment pornographiques.

Les années 1970 voient arriver des petits bijoux du genre Gorge profonde, mais aussi l'émergence du star-système et d'un professionnalisme croissant dans la production comme dans le marketing. Après la libéralisation de la législation allemande en 1973, et surtout à partir de 1974, le cinéma érotique et pornographique explose littéralement. La société de distribution Bauer KG et le groupe Beate Uhse en sont les figures de proue. Revers de la médaille et fin d'une illusion :

les " snuff-movies ", où fleurissent les scènes d'une incroyable brutalité, réelles ou simulées, ont de plus en plus d'amateurs.

Dans l'histoire de l'érotisme et de la pornographie, les années 1980 sont synonymes de banalisation, de production à la chaîne et d'essor de la vidéo - un marché qui préfigure la fin du porno au sens classique. Victime de l'augmentation des frais de production et de la rationalisation, l'industrie du cinéma porno entame son déclin. L'imagination et la qualité ne sont plus au rendez-vous. Le porno devient une drogue contre l'oubli à une époque qui ne croit plus aux lendemains qui chantent. Dans une campagne "PorNo" lancée en 1987, Alice Schwarzer, directrice de publication de la revue féministe " Emma ", milite pour une loi contre la représentation sexuelle dégradante des femmes et des jeunes filles.

En fait, ce sont surtout les supports du porno qui ont évolué et évoluent encore. Cassettes VHS, DVD, vidéo à la demande, numéros roses, salons de l'érotisme, prochainement accès par portable à des images porno, sans oublier l'omniprésent Internet : la pornographie est partout accessible, sur simple demande. Dans le même temps, les revendications pour une protection renforcée des mineurs se font de plus en plus pressantes, en particulier en relation avec le net.

Georg Sesslen, théoricien de l'art allemand, assimile la pornographie à un jeu auquel on a toujours joué et auquel on jouera toujours, sans qu'il y ait jamais de vainqueur. Trente-quatre ans après le salon " Sex 69 " de Copenhague, la pornographie a perdu sa virginité - Internet n'a fait que lui donner un coup de pouce. Cela fait belle lurette que l'idée d'une révolution sexuelle et d'une libération physique et psychologique semble hors d'atteinte. --Fabian Kress, via http://archives.arte-tv.com/fr/archive_271124.html [May 2005]

Histoire du cinéma érotique (1895 - 1980)

L'apparition d'un genre controversé (1895-1968)

Dès 1895, année de la création du cinématographe, la bobine de Serpentine dance créa un émoi à l'Exposition Universelle de Chicago au point qu'elle fut détruite quelques années plus tard. L'année suivante, c'est le premier baiser à l'écran dans The kiss entre John C. Rice et May Irwin, qui déclencha la polémique (un journaliste du Chicago Tribune demanda l'intervention de la police "contre cette obscénité").

La censure apparaît en 1907 aux USA et en 1909 en Angleterre et en France. A partir de là, la conquête de la nudité se fera dans deux circuits parallèles :

Eric Von Stroheim, qu'Hervé Bazin appelait "le marquis de Sade du cinéma", multiplie les scènes d'amour au clair de lune et les viols dans Folies de femmes (1922), La Symphonie nuptiale (1928), Mariage de prince (1927) et Queen Kelly (1928).

En 1930, le sénateur républicain Will H. Hays publie le code qui porte son nom et qui limite ce que les grandes sociétés de production hollywoodiennes peuvent montrer à l'écran (elles signeront le texte afin de redorer leur blason). Le code Hays établit des règles précise que les studios doivent respecter : les décolletés sont encadrés (de dos jusqu'à la taille, de face jusqu'à la naissance des seins), les "mouvements inconvenants" sont interdits et même le nombril ne peut être montré. Cela aura une conséquence très importante sur le fond et la forme des films américains jusqu'en 1961 (premièrs allégements significatifs) et 1966 (remplacement du Code Hays par un code d'autorégulation). Pour satisfaire le code Hays, Tarzan devra avoir un torse imberbe. L'évolution des tenues entre Tarzan, l'homme singe (1932) avec Johnny Weissmuller et sa suite Tarzan et sa compagne (1934) : Si dans le premier film, Jane porte une tenue dénudée adaptée à sa situation et au climat, dans le deuxième film à peine tourné deux ans plus tard, elle est revêtue d'une combinaison qui ne met plus du tout en valeur ses formes.

A partir de là, le cinéma européen se différencie de son homologue américain. En 1933, Heddy Lamarr (Heddy Kiesler) apparaît entièrement nue sortant de son bain dans Extase du Tchécoslovaque Machaty ; le gouvernement américain en fera brûler symboliquement une copie en 1935. En France, Arletty est également nue sous sa douche (mais une éponge au niveau de son bas-ventre) dans Le jour se lève en 1936 (mais le plan sera coupé par la censure).

Les producteurs américains soucieux de satisfaire le public libertin vont jouer avec les allusions. Le fétichisme (caché) est à son âge d'or, les actrices développent des poitrines de plus en plus fortes. A la Mae West des années 30 (que le magnat de la presse Heast qualifiait de "monstre lubrique"), succède une Jane Russell (la publicité du Banni de Howard Hughes était principalement basée sur sa poitrine généreuse, ce qui retarda la sortie du film de trois ans). En 1946, un strip-tease apparaît encore comme le comble de l'érotisme lorsque l'actrice enlève seulement son gant (Rita Hayworth dans Gilda).

En 1952, la Cour suprême des Etats-Unis revient sur sa décision de 1915 et décide que le cinéma peut également bénéficier de la liberté d'expression (1er et 14ème amendements).

Quatre ans plus tard, la sortie simultanée de Et Dieu créa la femme de Roger Vadim avec une Brigitte Bardot en sex-symbol de renommée mondiale et de Baby Doll d'Elia Kazan qui met en avant la sensualité de son héroïne ouvre une voie dans laquelle une partie importante de la production européenne et américaine va s'engouffrer, le cinéma italien en tête. Il y aura bien un durcissement de la censure à la fin des années 50, mais le mouvement est lancé.

A Hollywood, les réalisateurs, y compris les plus grands, jouent avec les métaphores. Ainsi, dans la mort aux trousses d'Alfred Hitchcock, la scène où Cary Grant et Eva Marie Saint s'enlacent pour une nuit amoureuse dans un wagon est suivie d'un plan montrant un train entrant dans un tunnel. De même, Spartacus de Stanley Kubrick contient une scène où l'homosexualité d'un des personnages est évoquée avec subtilité: Laurence Olivier y explique à Tony Curtis qu'il aime aussi bien "les huîtres" que "les escargots".

Les producteurs indépendants qui sentent bien la frustration d'une partie du public des années 50 créent un nouveau genre: le film de nudistes (pas de contact physique et aucune nudité montrée). Russ Meyer, ancien photographe de Playboy, s'engage dans cette brèche pour créer ses films parodiques avec des actrices aux seins hypertrophiés.

L'immoral M. Teas (1960) de Russ Meyer constitue l'un des premiers films à caractère pornographique américain qui ait bénéficié d'une distribution officielle et de l'attention d'une critique sérieuse. Par rapport à la production européenne importée sous le manteau, le film de Russ Meyer innovait en racontant une histoire (M. Teas a la faculté de déshabiller les femmes de son regard !) et de personnages ayant un minimum de psychologie. L'immoral M. Teas marque le début d'une série de films à succès pour son auteur et qui dépassent largement le cadre des salles spécialisées et attirent donc un nouveau public.

En Europe, les films érotiques se cachent encore derrière l'alibi de l'éducation sexuelle. La série allemande des Helga connaîtra un très gros succès en 1968 (plus 4 M de spectateurs en Allemagne et autant en France pour le premier des deux films). Sur les affiches, la prostitution, la traite des blanches, voire la libération des moeurs font par ailleurs fleurir des avertissements sur les affiches des films concernés en forme d'appel à consommer.

Il faudra néanmoins attendre 1965 pour qu'un grand studio montre des seins nus à l'écran (Le prêteur sur gages de Sydney Lumet). En Europe, Antonioni est le premier à montrer un pubis féminin dans Blow-up en 1967.

La censure gouvernementale tentera d'interdire La religieuse (de Diderot) réalisé par Jacques Rivette en 1966 et qui présente une mère supérieure "entreprenante". Aux USA, c'est en 1967 que le Congrès vote la création d'une commission sur la pornographie et l'obscénité pour faire face à une production montrant une nudité complète et des comportements sexuels de plus en plus libérés.

Deux ans plus tard, c'est Woodstock...

Les 70's : l'age d'or (1969-1980)

La fin des années 60 est marquée par un très fort mouvement social libertaire qui trouve sa principale concrétisation en France avec Mai 1968 et aux USA avec Woodstock. De cette dernière manifestation, sera tiré un film qui transmettra à travers le monde une image de liberté sexuelle.

Cette tendance libertaire va permettre au cinéma traditionnel d'aborder de nouveaux thèmes ou de parler plus ouvertement des relations sexuelles. L'homosexualité est traitée dans Thérèse et Isabelle, la polygamie dans Bob, Carole, Ted et Alice ou encore Le mariage collectif. Mais surtout en 1971, Le dernier tango à Paris avec Marlon Brando abordera la sodomie assurant au film une renommée et un succès dans les milieux intellectuels (5,1 M d'entrées en France dont 1,6 sur Paris intro-muros).

A partir de 1973, la France voit arriver une production de films B ou Z "avec séquences additionnelles", c'est-à-dire des films traditionnels à petit budget comportant des scènes rajoutées provenant de films hard ou érotiques. Ce phénomène durera un an jusqu'à l'exploitation in extenso des films d'où sont tirées ces scènes supplémentaires. Parmi cette production de films érotiques, on trouve L'étalon italien qui marque les débuts de Sylverster Stallone.

Se développe alors une production de luxe de films ouvertement érotiques qui bénéficie d'une promotion comparable à celle des films traditionnels. Emmanuelle sera le premier et le plus beau fleuron de cette époque.

Le cinéma populaire s'empare du mouvement et George Lautner réalise une comédie sur le sujet, On aura tout vu avec Pierre Richard et une Sabine Azema débutante très déshabillée. Les premiers films de Bertrand Blier (Les valseuses et Calmos) sont très emprunt de cette désacralisation du nu qui caractérise l'époque. Aux USA, les actrices de premier plan acceptent de se déshabiller. Le dessin-animé n'est pas en reste, puisque 1976 voit également sur les écrans Tarzoon, la honte de la jungle de Picha, qui raconte les aventures coquines de l'homme-singe.

Le cinéma italien produit également quantité d'oeuvres jouant sur l'érotisme de ses héroïnes. En 1976, Laura Antonelli gagne ainsi ses galons de star internationale grâce à Malicia et ses porte-jarretelles aguicheurs. Le genre sera à son apogée avec le Caligula de Trinto Brass en 1980.

Le mouvement gagne rapidement l'intelligentsia et des auteurs-réalisateurs tels qu'Alain Robe-Grillet, Marco Ferreri [La Grande Bouffe] ou encore Barbet Schroeder abordent de façon directe les divers aspects de la sexualité. Grâce à l'érotisme, le cinéma japonais parvient à s'exporter et le cinéaste Oshima obtient deux beaux succès avec L'empire des sens (515.000 entrées sur Paris-Périphérie en 1976) et L'empire de la passion (104.000 en 1978).

Parallèlement, se développent à partir de 1969 les premiers films hard-core (avec des actes sexuels non simulés). Le mouvement commence sur la côte Ouest (San Francisco) mais s'étend rapidement au reste du monde et atteint la France au milieu des années 70. Ainsi, Gorge profonde (avec Linda Lovelace) et L'Enfer pour Mrs Jones de Gérard Damiano, datent-ils respectivement de 1972 et 1973 mais sortent tous les deux en France en 1975 avec succès. Le premier attire 157.000 spectateurs sur Paris-périphérie et le second 102.000. Les Etats-Unis n'auront le droit qu'à des versions soft de ces deux films pourtant américains.

L'autre grand classique de cette époque est Derrière la porte verte (1975) des frères Mitchell. Du côté français, José Bénazéraf sort cette même année quatre films "hard". Les films pornographiques qui représentent la moitié des films projetés prennent 20% de part de marché sur Paris-ville et 15% sur la France (soit 25 M de spectateurs). Exhibition de Jean-François Davy attire 575.000 spectateurs sur Paris-périphérie et 15 M sur la France, soit un score comparable au succès des James Bond de l'époque. Trois autres films dépasseront le millions d'entrées France : Les jouisseuses en 1974 (2,2 M), Les expériences sexuelles de Flossie en 1975 (1,5 M) et La masseuse perverse en 1973 (1,1 M).

Mais cette prolifération de films "hard" crée une véritable levée de bouclier qui se fait de plus en plus vigoureuse. On pense d'abord à l'autodiscipline, mais ce n'est pas suffisant. Le 31 octobre 1975, est votée en France la loi qui institue le classement X, c'est-à-dire l'obligation de diffuser ces films dans des salles spécialisées, et la mise en place de taxation spécifique à ce type de film : TVA majorée et prélèvement supplémentaire de 20%, majoration de 50% des taux de la taxe supplémentaire additionnelle perçues à l'occasion de la projection et suppression de tout droit au soutien automatique. De plus, une taxe de 300.000 F est mise en place sur l'exploitation des films X étrangers créant alors un protectionnisme de fait qui va permettre à la production française de vivre correctement pendant encore quelques années (85% des films projetés sont français). Le cinéma X français crée alors ses stars : Alban Ceray, Jean-Pierre Armand, Richard Allan pour les hommes, Marylin Jess ou Brigitte Lahaye chez les femmes. En 1977; les salles X font encore 8 M d'entrées sur la France, soit 5% des entrées.

Cette loi fut votée par la droite parlementaire alors que la gauche y était majoritairement opposée. Une grande manifestation eu même lieu au Trocadéro et les partis de gauche annonçaient qu'ils dénonceraient cette "censure" à la prochaine alternance.

En 1981, la gauche revint au pouvoir... --http://www.zecinema.com/doss_erot2.htm [May 2005]

Just Jaeckin

The Story of O (1975) - Just Jaeckin [Amazon.com]

Just Jaeckin devient photographe au cours des années 60 et acquiert une solide réputation. En 1972, le producteur Yves Rousset-Rouard lui confie la mise en scène de Emmanuelle. Jaeckin est enchanté et accepte. Le film fait plus de 8 millions d'entrées en France en 1974 et décroche la première place du box-office national. Fraîchement auréolé de ce succès, Just Jaeckin devient le réalisateur érotique en vogue. Il réalise Histoire d'O en 1975 puis Madame Claude (1976). Il passe à l'écriture en 1977 pour Le dernier amant romantique mais aucun de ses films n'arrivent à égaler Emmanuelle en qualité et en succès. La fin du cinéma érotique sur grand écran achève sa carrière au début des années 80. Il réalise L'amant de lady Chatterley (1981) et son dernier film : Gwendoline (1983) d'après la célèbre bande-dessinée de John Willie.

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